Les mots surlignés font l'objet d'une note
1Reçue à Grenoble, le 13 janvier 1573.
2Monsieur, jay receu deus lettres quil vous a pleu mescrire, lune du XXVIIIe du
3passé laultre du premyer du present, ausquelles jeusse plustoust respondu si le
4mauvays temps des froidz, neiges et glaces n’eussent retenus les viateurs. Et ce qui ma
5les plus retardé à vous faire savoyr de noz nouvelles est qu’il y a troys jours que monsieur
6de Vure faisoit son conte de s’en retourner à Grenoble, sans le mauvays aller que faict
7en ce pays à rayson des counières, jeusse trouvé moyen de parler au sieur du Pouet. Je
8masseure que jeusse seu de luy la mauvaise harangue que lhomme que savés luy peult
9avoyr faict. Il y a assés temps pour en estre entierement esclarcy affin de decouvryr
10ceus qui sont doubles, et par mesme moyen faire estat deus à ladvenir comme ilz meritent.
11Au demeurant, monsieur, je vous remercye très humblement de la peyne quil vous a pleu
12prandre de parler à monsieur de Brigaudyères pour lasseurance de mon voyage de la
13court suivant la conclusion des estatz et y aller pourter la parcelle après lexpedition
14dicelle. Je seray prest au premyer mandement de messieurs du pays. Jespère que le beau
15temps vous conduyra à vous achemyner sabas. Avant lexpedition de ladite parcelle, quar
16lon me faict entandre que si elle est parachevée à la my febvrier, quilz auront usé de
17bonne dilligence, quoy quil en soit je suis desià aussi prest, comme sil falloyt partyr
18drès demain. Bien que je laye tousiours sellé à ma mère et ma femme quar ilz eurent
19court, questoit la cause quelles ne faisoyent que pleurer et lamanter journellement ; si
21bien que pour les ouster de ceste peyne, je leur ay faict en croyre que je ne bougeroys
22de ce pays de fasson que jay eu toutes les peynes du monde à les garder de veoyr
23les lettres quil vous a pleu mescrire. Pour ce je vous supplye, monsieur, comme vous
24apprendrés que ladite parcelle sera preste, de mescrire de vous aller trouver à
25la part où vous serés, y adioustant certaynes occasions que bon vous semblera, pour
26eviter les fascheryes et pleurs qui se presenteroyent. Joblyoys à vous dire que jay
27receu les lettres de messieurs d’Evènes et de Laval, par la voye de vostre dernière
28despeche du premier de ce moys. Je loue Dyeu de bon cœur que leurs santé soit toujours
29très bonne. Monsieur de Vure vous dira lapointement de messieurs de Gaubert
30[25v°] et de La Bastye dont je suis imfiniement ayse. Monsieur de Villeneufve
31de la compaignie de monsieur de Joyeuse ha esté ourdonné avecques des
32compaignyes de gens de piet, et quelque cavallerye, pour aller faire vivre
33ces trouppes et imcommoder daultant les ennemys, et ha commancé son entrée [par]
34ung bourc nommé Couvisson quil ha prins sans aulcune resistance, hors
35bellistres qui estoyent dans lesglise qui ce sont despuis randu, tenans
36encoure fort et ferme auiourdhuy de là, comme il pansoit tirer. Puys il cest
37surprins de ces grans neiges, et veult on dire que sen cella encoure il treuve à
38quy parler, mays comme il est brave gentilhomme chacun tient qu’il s’en sauva.
39Il y a quelques jours je vous envoye la presente et n’eusse tant mis à donner
40de noz nouvelles mays monsieur de Vure ne peult partyr si toust comme il
41disoit. Jay receu la lettre quil vous a pleu mescrire par Gellibert. Javoys eu des
42nouvelles de la court comme Monsieur et monseigneur le duc et monsieur
43devoyent partyr en pouste par le landemain des Roys pour aller en Anjou
44en s’appprochant de La Rochelle. Il me semble que pour ces nouvelles il nestoyt
45besoin de prandre l’allarme trop chaude, quar jestime que si grantz princes ne
46marchent pas à poinct nommé, et que sera beaucoup silz partent au commancement de
47ce caresme, il y yra du temps en après à dresser leurs armées, si bien que j’ey
48bien le loysir de my randre à temps et à heure. Nayant aultre chose pour astheure ?
49merite vous escrire, je salueray voz bonnes graces par mes très humbles recommandations.
50Priant Notre Seigneur vous donner,
51monsieur, en très bonne santé longue et heureuse vye. Au Montelimar,
52ce Xe janviert
53Vostre très humble et très obéissant
54filz et à jamays serviteur
55dourches